Page:Zola - Germinal.djvu/232

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
232
LES ROUGON-MACQUART.

— Qu’y a-t-il ? demanda M. Hennebeau. Si ce sont des dépêches, donnez-les-moi… J’attends des réponses.

— Non, Monsieur, c’est monsieur Dansaert qui est dans le vestibule… Mais il craint de déranger.

Le directeur s’excusa et fit entrer le maître-porion. Celui-ci se tint debout, à quelques pas de la table ; tandis que tous se tournaient pour le voir, énorme, essoufflé des nouvelles qu’il apportait. Les corons restaient tranquilles ; seulement, c’était une chose décidée, une délégation allait venir. Peut-être, dans quelques minutes, serait-elle là.

— C’est bien, merci, dit M. Hennebeau. Je veux un rapport matin et soir, entendez-vous !

Et, dès que Dansaert fut parti, on se remit à plaisanter, on se jeta sur la salade russe, en déclarant qu’il fallait ne pas perdre une seconde, si l’on voulait la finir. Mais la gaieté ne connut plus de borne, lorsque Négrel ayant demandé du pain à la femme de chambre, celle-ci lui répondit un : « Oui, Monsieur », si bas et si terrifié, qu’elle semblait avoir derrière elle une bande, prête au massacre et au viol.

— Vous pouvez parler, dit madame Hennebeau complaisamment. Ils ne sont pas encore ici.

Le directeur, auquel on apportait un paquet de lettres et de dépêches, voulut lire une des lettres tout haut. C’était une lettre de Pierron, dans laquelle, en phrases respectueuses, il avertissait qu’il se voyait obligé de se mettre en grève avec les camarades, pour ne pas être maltraité ; et il ajoutait qu’il n’avait même pu refuser de faire partie de la délégation, bien qu’il blâmât cette démarche.

— Voilà la liberté du travail ! s’écria M. Hennebeau.

Alors, on revint sur la grève, on lui demanda son opinion.

— Oh ! répondit-il, nous en avons vu d’autres… Ce