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Page:Zola - Germinal.djvu/363

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GERMINAL.

chez le monde. Lorsqu’elle entra dans le bâtiment des chaudières, les femmes en chassaient déjà les deux chauffeurs, et la Brûlé, armée d’une grande pelle, accroupie devant un des foyers, le vidait violemment, jetait le charbon incandescent sur le carreau de briques, où il continuait à brûler avec une fumée noire. Il y avait dix foyers pour les cinq générateurs. Bientôt, les femmes s’y acharnèrent, la Levaque manœuvrant sa pelle des deux mains, la Mouquette se retroussant jusqu’aux cuisses afin de ne pas s’allumer, toutes sanglantes dans le reflet d’incendie, suantes et échevelées de cette cuisine de sabbat. Les tas de houille montaient, la chaleur ardente gerçait le plafond de la vaste salle.

— Assez donc ! cria la Maheude. La cambuse flambe.

— Tant mieux ! répondit la Brûlé. Ce sera de la besogne faite… Ah ! nom de Dieu ! je disais bien que je leur ferais payer la mort de mon homme !

À ce moment, on entendit la voix aiguë de Jeanlin.

— Attention ! je vas éteindre, moi ! je lâche tout !

Entré un des premiers, il avait gambillé au travers de la cohue, enchanté de cette bagarre, cherchant ce qu’il pourrait faire de mal ; et l’idée lui était venue de tourner les robinets de décharge, pour lâcher la vapeur. Les jets partirent avec la violence de coups de feu, les cinq chaudières se vidèrent d’un souffle de tempête, sifflant dans un tel grondement de foudre, que les oreilles en saignaient. Tout avait disparu au milieu de la vapeur, le charbon pâlissait, les femmes n’étaient plus que des ombres aux gestes cassés. Seul, l’enfant apparaissait, monté sur la galerie, derrière les tourbillons de buée blanche, l’air ravi, la bouche fendue par la joie d’avoir déchaîné cet ouragan.

Cela dura près d’un quart d’heure. On avait lancé quelques seaux d’eau sur les tas, pour achever de les éteindre : toute menace d’incendie était écartée. Mais la