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GERMINAL.

Grégoire disparaissaient, lorsque la grêle des pierres recommença. Revenue de son étonnement, la foule clamait plus fort :

— À mort les bourgeois ! vive la sociale !

Rose continuait à rire, dans le vestibule de l’hôtel, comme égayée de l’aventure, répétant au domestique terrifié :

— Ils ne sont pas méchants, je les connais.

M. Grégoire accrocha méthodiquement son chapeau. Puis, lorsqu’il eut aidé madame Grégoire à retirer sa mante de gros drap, il dit à son tour :

— Sans doute, ils n’ont pas de malice au fond. Lorsqu’ils auront bien crié, ils iront souper avec plus d’appétit.

À ce moment, M. Hennebeau descendait du second étage. Il avait vu la scène, et il venait recevoir ses invités, de son air habituel, froid et poli. Seule, la pâleur de son visage disait les larmes qui l’avaient secoué. L’homme était dompté, il ne restait en lui que l’administrateur correct, résolu à remplir son devoir.

— Vous savez, dit-il, que ces dames ne sont pas rentrées encore.

Pour la première fois, une inquiétude émotionna les Grégoire. Cécile pas rentrée ! comment rentrerait-elle, si la plaisanterie de ces mineurs se prolongeait ?

— J’ai songé à faire dégager la maison, ajouta M. Hennebeau. Le malheur est que je suis seul ici, et que je ne sais d’ailleurs où envoyer mon domestique, pour me ramener quatre hommes et un caporal, qui me nettoieraient cette canaille.

Rose, demeurée là, osa murmurer de nouveau :

— Oh ! monsieur, ils ne sont pas méchants.

Le directeur hocha la tête, pendant que le tumulte croissait au-dehors et qu’on entendait le sourd écrasement des pierres contre la façade.