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LES ROUGON-MACQUART.

bibelots, tellement le lavage du logement était sérieux ; les clous restaient aux murs, pas davantage, et il y en avait bien deux livres de trois sous. Gervaise, empêtrée là dedans, les bras cassés par cette addition, se fâchait, donnait des coups de poing sur la table, ou bien finissait par pleurer comme une bête. Un soir, elle cria :

— Je file demain, moi !… J’aime mieux mettre la clef sous la porte et coucher sur le trottoir, que de continuer à vivre dans des transes pareilles.

— Il serait plus sage, dit sournoisement Lantier, de céder le bail, si l’on trouvait quelqu’un… Lorsque vous serez décidés tous les deux à lâcher la boutique…

Elle l’interrompit avec plus de violence :

— Mais tout de suite, tout de suite !… Ah ! je serais joliment débarrassée !

Alors, le chapelier se montra très pratique. En cédant le bail, on obtiendrait sans doute du nouveau locataire les deux termes en retard. Et il se risqua à parler des Poisson, il rappela que Virginie cherchait un magasin ; la boutique lui conviendrait peut-être. Il se souvenait à présent de lui en avoir entendu souhaiter une toute semblable. Mais la blanchisseuse, au nom de Virginie, avait subitement repris son calme. On verrait ; on parlait toujours de planter là son chez soi dans la colère, seulement la chose ne semblait pas si facile, quand on réfléchissait.

Les jours suivants, Lantier eut beau recommencer ses litanies, Gervaise répondait qu’elle s’était vue plus bas et s’en était tirée. La belle avance, lorsqu’elle n’aurait plus sa boutique ! Ça ne lui donnerait pas du pain. Elle allait, au contraire, reprendre des ouvrières et se faire une nouvelle clientèle. Elle disait cela pour se débattre contre les bonnes raisons du