Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/155

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ma couverture, en dehors de la société, ne pouvant même aller chercher ma part de soleil. Je n’espérais plus en rien ; j’avais borné ma vie à ces quatre murs noirs, à ce coin du ciel que je voyais entre les cheminées ; je m’étais enfermé dans mon cachot, j’y avais enfermé mes pensées, mes désirs. Je ne sais si vous entendez bien cela : un jour, n’ayez pas de chemise, & vous comprendrez que l’homme puisse faire un monde, vaste & plein, du lit sur lequel il est couché.

C’est alors que j’ai rencontré une femme, en allant de la fenêtre à la porte. Laurence, étendue sur le lit, me regardait marcher pendant des heures entières. À chaque allée & venue, je passais devant elle, je trouvais ses yeux qui me suivaient tranquillement. Je sentais ce regard attaché sur moi, j’étais comme soulagé dans mon ennui ; je ne saurais dire quelle intime & étrange consolation je prenais à me savoir regardé par un être vivant, par une femme. C’est