Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/191

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

gaieté franche de la jeunesse. Les jours passés n’étaient plus, l’avenir m’apparaissait dans une lueur, calme & splendide. Mes rêves de virginité, mon amour de la lumière allaient être contentés ; dès cette heure, commençait une vie d’extase & de tendresse. Je ne songeais plus à la Bièvre, à cet égout noirâtre au bord duquel j’avais eu l’effrayante tentation de m’asseoir & d’embrasser Laurence. Je voulais maintenant habiter la maison blanche, là-bas, au seuil du bouquet d’arbres, y vivre à jamais avec mon amie, avec ma femme, dans la rosée, dans le soleil, dans l’air pur.

Laurence venait d’attacher son bouquet à l’aide d’un brin d’herbe. Il était onze heures, nous n’avions encore rien mangé. Il nous a fallu quitter ces arbres sous lesquels mon âme avait aimé pour la première fois, & nous mettre en quête d’un cabaret. J’ai marché devant, à travers la campagne, par des sentiers étroits, bordés de champs