Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/196

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aveugle, d’avoir entrevu des milliers d’astres dans mes ténèbres.

Le soir, sans savoir comment, nous nous sommes retrouvés au Coup du milieu. Il y avait foule. Des jeunes femmes & des jeunes hommes emplissaient les bosquets, faisant tapage ; les robes blanches, les rubans rouges & bleus tachaient le vert tendre des feuilles ; les éclats de rire traînaient doucement dans le crépuscule. Des bougies avaient été allumées sur les tables, piquant de points lumineux l’ombre naissante. Des Tyroliens chantaient au milieu de l’allée.

Nous avons mangé sur un bout de table, comme le matin, nous mêlant aux rires, faisant effort pour sortir de nous-mêmes. La jeunesse bruyante qui nous entourait, m’effrayait un peu ; je croyais retrouver là beaucoup de Jacques, beaucoup de Maries. Entre les branches, j’apercevais un coin du ciel, pâle & mélancolique, sans étoiles encore ; j’avais peine à