Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/238

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cusé Laurence, je lui ai demandé de la loyauté & de la franchise, je lui ai dit combien elle m’avait fait pleurer. Je ne lui adressais pas des reproches pour me mieux excuser ; mes lèvres s’ouvraient malgré moi, tout le présent m’emplissait, mes pensées de chaque jour s’unissaient en une seule plainte tendre & résignée, dégagée de toute colère, de toute rancune. Mes reproches, mes confidences ont été mêlés d’effusions d’amour, de tendresses soudaines ; j’ai parlé ce langage de la passion, puéril & ineffable, montant en plein ciel, me traînant à terre ; je me suis servi de cette poésie adorable & ridicule des enfants & des amants ; j’ai été fou, passionné, ivre. Et j’allais ainsi, comme dans un rêve, interrogeant, répondant, parlant d’une voix profonde & régulière, pressant Laurence contre ma poitrine. Pendant une grande heure, j’ai entendu les paroles qui, d’elles-mêmes, sortaient de ma bouche, douces, navrées ; je me soulageais à écouter cette