Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/263

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devant Laurence endormie, j’ai oublié que je venais de voir Jacques, je n’ai plus eu conscience de ses conseils ni de ses insultes ; le cœur & la raison de cet homme me semblaient des abîmes obscurs dans lesquels je ne pouvais descendre. J’étais seul, face à face avec mon amour, comme hier, comme toujours ; je n’avais plus qu’une pensée, celle d’éveiller Laurence, de l’étreindre, de la forcer à la vie & aux baisers.

Je l’ai éveillée, je l’ai prise avec emportement dans mes bras, je l’ai serrée à la faire crier. J’avais une rage muette, une volonté implacable. J’étais las d’être en dehors de Laurence, d’ignorer ce qui se passait en elle ; je trouvais plus simple d’être elle-même. Je me disais que là je n’aurai plus de soupçons, que je la forcerais bien à m’aimer, en échauffant son cœur sous mes caresses.

Laurence ne m’avait pas parlé depuis deux jours. La douleur a desserré ses lèvres.