Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/278

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oublieux de la foule. La jeune femme s’appuyait à l’épaule du jeune homme, elle le contemplait, émue & souriante, & lui, dans un regard, il lui rendait son émotion, son sourire. Le couple rayonnait.

Il y a donc des amours jeunes. Tandis que je vis misérable, à l’ombre, déchiré par une passion horrible, il y a donc, dans les rayons de mai, des amants qui vivent de douceur. Je ne savais pas qu’on pouvait s’aimer ainsi, je croyais que les baisers devaient être âcres et poignants.

Maintenant, je me rappelle. Les amants s’en vont deux à deux, dans les clairs de lune, dans les aurores. Ils sont vêtus d’étoffes légères. Ils s’embrassent à chaque pas d’une façon tendre, recueillie, ils vivent au milieu des herbes, au milieu des foules, & ils sont toujours seuls. Le ciel sourit, la terre se fait discrète, l’univers est complice. Les amants échangent leurs cœurs, ils vivent l’un de la vie de l’autre.

Moi, je me suis enfermé ici. Je ne puis