abris. Mais il se présenta un espace découvert, un bout de chemin défoncé, déjà couvert d’éclats ; et elle attendait, à l’encoignure d’un hangar, lorsqu’elle aperçut, devant elle, au ras d’une sorte de trou, la tête curieuse d’un enfant, qui regardait. C’était un petit garçon de dix ans, pieds nus, habillé d’une seule chemise et d’un pantalon en lambeaux, quelque rôdeur de route, très amusé par la bataille. Ses minces yeux noirs pétillaient, et il s’exclamait d’allégresse, à chaque détonation.
— Oh ! ce qu’ils sont rigolo !… Bougez pas, en v’là encore un qui s’amène !… Boum ! a-t-il pété, celui-là !… Bougez pas, bougez pas !
Et, à chaque projectile, il faisait un plongeon au fond du trou, reparaissait, levait sa tête d’oiseau siffleur, pour replonger encore.
Henriette remarqua alors que les obus venaient du Liry, tandis que les batteries de Pont-Maugis et de Noyers ne tiraient plus que sur Balan. Elle voyait très nettement la fumée, à chaque décharge ; puis, elle entendait presque aussitôt le sifflement, que suivait la détonation. Il dut y avoir un court répit, des vapeurs légères se dissipaient lentement.
— Pour sûr qu’ils boivent un coup ! cria le petit. Vite, vite ! Donnez-moi la main, nous allons nous cavaler !
Il lui prit la main, la força à le suivre ; et tous deux galopèrent, côte à côte, pliant le dos, traversant ainsi l’espace découvert. Au bout, comme ils se jetaient derrière une meule et qu’ils se retournaient, ils virent de nouveau un obus arriver, tomber droit sur le hangar, à la place qu’ils occupaient tout à l’heure. Le fracas fut épouvantable, le hangar s’abattit.
Du coup, une joie folle fit danser le gamin, qui trouvait ça très farce.
— Bravo ! en v’là de la casse !… Hein ? tout de même, il était temps !