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LA FAUTE DE L’ABBÉ MOURET.

claires, qui coulaient sur ses joues. Leur joie d’être enfin là restait indicible.

— Viens, dit-elle à son oreille, d’une voix plus légère qu’un souffle.

Et elle alla, la première, se coucher au pied même de l’arbre. Elle lui tendit les mains avec un sourire, tandis que lui, debout, souriait aussi, en lui donnant les siennes. Lorsqu’elle les tint, elle l’attira à elle, lentement. Il tomba à son côté. Il la prit tout de suite contre sa poitrine. Cette étreinte les laissa pleins d’aise.

— Ah ! tu te rappelles, dit-il, ce mur qui semblait nous séparer… Maintenant, je te sens, il n’y a plus rien entre nous… Tu ne souffres pas ?

— Non, non, répondit-elle. Il fait bon.

Ils gardèrent le silence, sans se lâcher. Une émotion délicieuse, sans secousse, douce comme une nappe de lait répandue, les envahissait. Puis, Serge promena les mains le long du corps d’Albine. Il répétait :

— Ton visage est à moi, tes yeux, ta bouche, tes joues… Tes bras sont à moi, depuis tes ongles jusqu’à tes épaules… Tes pieds sont à moi, tes genoux sont à moi, toute ta personne est à moi.

Et il lui baisait le visage, sur les yeux, sur la bouche, sur les joues. Il lui baisait les bras, à petits baisers rapides, remontant des doigts jusqu’aux épaules. Il lui baisait les pieds, il lui baisait les genoux. Il la baignait d’une pluie de baisers, tombant à larges gouttes, tièdes comme les gouttes d’une averse d’été, partout, lui battant le cou, les seins, les hanches, les flancs. C’était une prise de possession sans emportement, continue, conquérant les plus petites veines bleues sous la peau rose.

— C’est pour me donner que je te prends, reprit-il. Je veux me donner à toi tout entier, à jamais ; car, je le sais bien à cette heure, tu es ma maîtresse, ma souveraine, celle