Page:Zola - Le Capitaine Burle et 5 autres nouvelles.djvu/104

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on lui a donné le lit, et encore y est-il très mal, car on a porté poignée à poignée la laine du matelas chez une brocanteuse, des demi-livres à la fois, pour quatre ou cinq sous. À cette heure, ce sont le père et la mère qui couchent dans un coin, sur une paillasse dont les chiens ne voudraient pas.

Cependant, tous deux regardent Charlot sauter dans le lit. Qu’a-t-il donc, ce mioche, à battre la campagne ? Peut-être bien qu’une bête l’a mordu ou qu’on lui a fait boire quelque chose de mauvais. Une voisine, madame Bonnet, est entrée ; et, après avoir flairé le petit, elle prétend que c’est un froid et chaud. Elle s’y connaît, elle a perdu son mari dans une maladie pareille.

La mère pleure en serrant Charlot entre ses bras. Le père sort comme un fou et court chercher un médecin. Il en ramène un, très grand, l’air pincé, qui écoute dans le dos de l’enfant, lui tape sur la poitrine, sans dire une parole. Puis, il faut que madame Bonnet aille prendre chez elle un crayon et du papier, pour qu’il puisse écrire son ordonnance. Quand il se retire, toujours muet, la mère l’interroge d’une voix étranglée.

— Qu’est-ce que c’est, monsieur ?

— Une pleurésie, répond-il d’un ton bref, sans explication.