Page:Zola - Le Capitaine Burle et 5 autres nouvelles.djvu/106

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Morisseau casse toujours la glace ; seulement, ses quarante sous ne suffisent pas. Comme ce froid rigoureux peut tuer Charlot, il souhaite le dégel, tout en le redoutant. Quand il part au travail, il est heureux de voir les rues blanches ; puis, il songe au petit qui agonise là-haut, et il demande ardemment un rayon de soleil, une tiédeur de printemps balayant la neige. S’ils étaient seulement inscrits au bureau de bienfaisance, ils auraient le médecin et les remèdes pour rien. La mère s’est présentée à la mairie, mais on lui a répondu que les demandes étaient trop nombreuses, qu’elle devait attendre. Pourtant, elle a obtenu quelques bons de pain ; une dame charitable lui a donné cinq francs. Ensuite, la misère a recommencé.

Le cinquième jour, Morisseau apporte sa dernière pièce de quarante sous. Le dégel est venu, on l’a remercié. Alors, c’est la fin de tout : le poêle reste froid, le pain manque, on ne descend plus les ordonnances chez le pharmacien. Dans la chambre ruisselante d’humidité, le père et la mère grelottent, en face du petit qui râle. Madame Bonnet n’entre plus les voir, parce qu’elle est sensible et que ça lui fait trop de peine. Les gens de la maison passent vite devant leur porte. Par moments,