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Page:Zola - Le Capitaine Burle et 5 autres nouvelles.djvu/61

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mencer. Mais les yeux du major restaient implacables ; l’honneur parlait, il étranglait son attendrissement de brave homme.

— Finissons ! murmura-t-il entre ses dents.

Cette fois, ce fut lui qui attaqua. Il y eut un éclair. Son épée flamba en passant de droite à gauche, revint, et alla se planter par un coup droit foudroyant dans la poitrine du capitaine, qui tomba comme une masse, sans même pousser un cri.

Laguitte avait lâché l’épée, tout en regardant sa pauvre vieille vache de Burle étendu sur le dos, avec son gros ventre en l’air. Il répétait, furieux et cassé d’émotion :

— Nom de Dieu de nom de Dieu !

On l’emmena. Ses deux jambes étaient prises, ses témoins durent le soutenir à droite et à gauche, car il ne pouvait même plus se servir de sa canne.

Deux mois plus tard, l’ancien major se traînait au soleil, dans une rue déserte de Vauchamp, lorsqu’il se trouva de nouveau face à face avec madame Burle et le petit Charles. Tous les deux étaient en grand deuil. Il voulut les éviter, mais il marchait mal, et ils arrivaient droit sur lui, sans ralentir ni presser le pas. Charles avait toujours son doux visage effrayé de fille. Madame Burle gardait sa haute mine rigide, plus dure et plus creusée.