Page:Zola - Le Naturalisme au théâtre, Charpentier, 1881.djvu/142

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le jeu de scène. Nous sommes habitués à ces choses, elles ne nous blessent plus ; seulement, elles gâtent l’illusion et elles font du théâtre un art faux qui compromet les plus grandes œuvres.

Je ne parle pas des peuples latins, des Italiens et des Espagnols, dont l’art dramatique est encore plus ampoulé et plus conventionnel. Mais, chez les peuples du Nord, les comédiens jouent beaucoup plus librement, sans tant s’inquiéter de la pompe de la représentation. Par exemple, chez nous, il n’y a que les grands comédiens, ceux dont l’autorité est souveraine sur le public, qui osent lancer certaines répliques en tournant le dos à la salle. Cela n’est pas convenable. Pourtant, il y a des effets puissants à tirer de la vérité de cette attitude, qui se produit à chaque instant dans la vie réelle. Le fâcheux est que nos comédiens jouent pour la salle, pour le gala ; ils sont sur les planches comme sur un piédestal, ils veulent voir et être vus. S’ils vivaient les pièces au lieu de les jouer, les choses changeraient.

On parle de l’optique théâtrale. Cette optique n’est jamais que ce qu’on la fait. Si l’enseignement serrait la vie de plus près, si l’on ne changeait pas les élèves comédiens en pantins mécaniques, on trouverait des interprètes qui renouvelleraient la mise en scène et feraient enfin monter la vérité sur les planches.


II

L’éducation classique et traditionnelle donnée aux jeunes comédiens est donc en soi une excellente chose, car elle sert à former des sujets d’une bo