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Page:Zola - Le Naturalisme au théâtre, Charpentier, 1881.djvu/163

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profondément originales. En un mot, nous tous qui travaillons pour l’avenir, nous demandons des comédiennes de génie.


V

Le cas de madame Sarah Bernhardt me paraît des plus intéressants et des plus caractéristiques. Je n’ai pas à prendre la défense de la grande artiste, que son talent défendra suffisamment. Mais je ne puis résister au besoin d’étudier, à son sujet, ce fameux besoin de réclame qui affole notre époque, selon les chroniqueurs.

D’abord, posons nettement les situations. Madame Sarah Bernhardt est accusée d’être dévorée d’une fièvre de publicité. A entendre les chroniqueurs et les reporters de notre presse parisienne, elle ne dit pas une parole, ne risque pas un acte, sans en calculer à l’avance le retentissement. Non contente d’être une comédienne adorée du public, elle a cherché à se singulariser en touchant à la sculpture, à la peinture, à la littérature. Enfin, on en est venu à dire que, tout à fait affolée par sa rage de réclame, compromettant la dignité de la Comédie-Française, elle avait fini par se montrer à Londres, vêtue en homme, pour un franc.

Quant aux chroniqueurs et aux reporters qui dressent aujourd’hui ce réquisitoire, ils prennent des attitudes de moralistes affligés. Ils pleurent sur ce beau talent qui se compromet. Ils menacent la comédienne de la lassitude du public et lui font entend