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Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/208

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Marius se pencha davantage, et d’un ton bas et craintif :

« Les vagues m’ont dit que je vous aimais », murmura-t-il.

L’ombre tombait, plus grise et plus solennelle. Au ciel, des clartés blanchissaient, dans une transparence laiteuse. La mer immobile, d’un bleu sombre, s’endormait en respirant d’une haleine lente et forte. Des senteurs fraîches et salées montaient, portées par le vent du soir, et les sérénités de l’espace s’élargissaient dans la nuit croissante.

L’heure était douce pour un aveu d’amour. Une tendresse divine, un calme souriant sortait de la grande mer attendrie. Au pied de la falaise, les vagues battaient lentement, berçant la côte qui sommeillait ; tandis que, de la terre, chaude encore et fiévreuse, venaient des souffles âpres de passion. On eût dit que la grande mer appuyait de sa voix les tendres paroles de Marius.

« Eh bien ! dit gaiement la bouquetière, les vagues sont des bavardes... Vous ont-elles dit la vérité, au moins ?

– Oui, oui, s’écria-t-il, les vagues ont dit la vérité... Je le sens maintenant, mon amie, je vous aime depuis des mois... Ah ! que cet aveu me fait de bien. Voici longtemps qu’il me manquait quelque chose : lorsque j’étais en face de vous, une douceur me pénétrait, j’entendais des voix confuses au fond de moi, et je ne pouvais distinguer ce qu’elles murmuraient. Aujourd’hui, il a suffi du silence de cette falaise pour que je les entendisse crier mon amour. »

Fine écoutait en souriant les paroles de Marius. L’ombre devenait de plus en plus bleuâtre et mystérieuse.

Marius eut un moment d’hésitation. Puis d’un ton humble et doux :

« Vous ne vous fâchez pas de ce que je vous dis là ? demanda-t-il. Je sais bien que vous ne pouvez m’aimer.

– Vous ne savez rien du tout, répondit Fine avec une