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Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/262

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c’est comme il faut... Qu’est-ce que vous voulez manger ? »

Marius s’excusa en faisant observer qu’il était trois heures et qu’il avait déjeuné depuis longtemps.

« Bah ! on mange toujours, s’écria Sauvaire, ravi d’être surpris en partie fine. Nous allons manger jusqu’à ce soir comme cela... Ça coûtera de l’argent, mais tant pis !... Clairon, ma fille, tu vas te griser, si tu bois trop de champagne. »

Clairon ne tint pas compte de l’observation et avala un grand verre de champagne. D’ailleurs, elle n’avait plus rien à craindre, elle était grise.

« Bon Dieu ! que ces femmes-là sont amusantes ! » continua Sauvaire en se levant et en s’éventant à coups de serviette.

Il s’approcha de la rampe de la terrasse et cria très fort, pour être entendu des passants.

« J’ai déjà dépensé beaucoup d’argent avec elles, mais je ne le regrette pas, elles sont drôles ! »

Marius s’accouda à côté de lui.

« Voulez-vous passer une bonne soirée demain ? lui demanda-t-il brusquement.

– Pardieu, si je le veux ! répondit Sauvaire.

– Ça vous coûtera quelques louis.

– Diable !... Sera-ce très drôle ?

– Très drôle. Vous rirez pour votre argent.

– J’accepte alors.

– Tout Marseille connaîtra l’aventure, et l’on parlera de vous pendant huit jours.

– J’accepte, j’accepte.

– Eh bien ! écoutez. »

Marius se pencha à l’oreille de Sauvaire et lui parla à voix basse. Il lui exposait son plan. Au bout d’un instant, le maître portefaix se mit à éclater d’un large rire qui manqua l’étouffer. Il trouvait la chose drôle, très drôle.

« C’est convenu, dit-il quand Marius eut terminé sa confidence. Je me trouverai demain soir avec Clairon, sur le boulevard de là Corderie, à dix heures. Ah ! la bonne farce ! »