Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/280

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Quand leur stupeur douloureuse fut un peu dissipée, Fine se redressa.

« Allons voir mon oncle, dit-elle, il doit être chez une de ses cousines, rue de la Glacière.

– À quoi bon ? répondit Marius, tout est perdu.

– Non, non, venez toujours. »

Il la suivit, comme écrasé sous le désespoir. Elle marchait gaillardement ne pouvant croire que le hasard fût si cruel.

Revertégat se trouvait en effet, chez sa cousine de la rue de la Glacière. Il y était alité depuis quinze jours. Quand il vit entrer les deux jeunes gens, il comprit ce qu’ils venaient réclamer de lui. Il se souleva, baisa sa nièce au front, et lui dit avec un sourire :

« Eh bien ! l’heure est donc venue ?

– Nous sommes allés à la prison, répondit la jeune fille. On nous a dit que vous étiez malade.

– Mon Dieu ! pourquoi ne nous avez-vous pas prévenus ? s’écria douloureusement Marius. Nous nous serions hâtés.

– Oui, reprit la bouquetière, maintenant que vous n’êtes plus geôlier, comment allons-nous faire ? »

Revertégat les regardait, surpris de ce désespoir.

« Pourquoi vous désolez-vous ? demanda-t-il enfin. Je suis un peu souffrant, c’est vrai, j’ai demandé un congé, mais j’occupe toujours ma place ; je me mets à vos ordres pour demain soir, si vous le voulez. »

Marius et Fine poussèrent un cri de joie.

« L’homme qui vous a répondu, continua Revertégat, a été chargé de me remplacer pour quelques jours. Demain matin, j’irai reprendre mon emploi, je n’ai plus qu’un peu de fièvre, je puis sortir sans danger. D’ailleurs, le cas est pressant.

– Je savais bien qu’il ne fallait pas désespérer ! » cria triomphalement la bouquetière.

Marius était tout tremblant d’émotion.

« Vous avez eu raison de venir me voir aujourd’hui, reprit le geôlier après un court silence. J’ai appris ce