Page:Zola - Les Trois Villes - Lourdes, 1894.djvu/192

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pénétra dans la salle commune, le nombre des personnes, entassées là, le surprit ; tandis que la suffocante chaleur amassée entre les murs de bois, que le soleil surchauffait, lui brûlait la face. C’était une pièce carrée, peinte en jaune clair, nue, avec une seule fenêtre, aux carreaux brouillés de blanc, afin que la foule, qui s’écrasait dehors, ne pût rien voir. On n’osait pas même ouvrir la fenêtre, pour donner de l’air ; car, aussitôt, un flot de têtes curieuses entraient. Et le mobilier restait rudimentaire : deux tables de sapin, d’inégale hauteur, placées bout à bout, qu’on n’avait seulement pas recouvertes d’un tapis ; une sorte de grand casier, encombré de paperasses mal tenues, de dossiers, de registres, de brochures ; enfin, des chaises de paille, une trentaine, tenant tout le plancher, et deux vieux fauteuils déloquetés, pour les malades.

Tout de suite, le docteur Bonamy s’était empressé au-devant du docteur Chassaigne, qui était une des dernières et une des plus glorieuses conquêtes de la Grotte. Il lui trouva une chaise, fit asseoir également Pierre, dont il salua la soutane. Puis, de son ton de grande politesse :

— Mon cher confrère, vous me permettez de continuer… Nous étions en train d’examiner mademoiselle.

Il s’agissait d’une sourde, une paysanne de vingt ans, assise dans l’un des fauteuils. Mais, au lieu d’écouter, Pierre, les jambes lasses, la tête bourdonnante encore, se contentait de regarder, tâchait de se rendre compte du personnel qui se trouvait là. On pouvait être une cinquantaine, beaucoup se tenaient debout, adossés contre le mur. Devant les deux tables, ils étaient cinq : le chef du service des piscines au milieu, penché sur un gros registre ; puis, un père de l’Assomption et trois jeunes séminaristes, qui servaient de secrétaires, écrivant, passant les dossiers, les reclassant, après chaque examen. Et Pierre s’intéressa un instant à un père de l’Immaculée-