Page:Zola - Les Trois Villes - Lourdes, 1894.djvu/218

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épaule, au milieu de l’ébouriffement de ses adorables cheveux blonds. Et ni les plaintes, ni les appels, aucun bruit ne la réveilla plus.

Doucement, madame de Jonquière était revenue dire au jeune prêtre :

— J’avais bien l’idée d’envoyer chercher monsieur Ferrand, vous savez, l’interne qui nous accompagne : il aurait donné à la pauvre demoiselle quelque chose pour la calmer. Seulement, il est occupé en bas, dans la salle des ménages, près du frère Isidore. Et puis, nous ne soignons pas ici, nous ne venons que pour remettre nos chères malades entre les mains de la sainte Vierge.

Sœur Hyacinthe, qui passait la nuit avec la directrice, s’approcha.

— Je remonte de la salle des ménages, où j’avais promis de porter des oranges à monsieur Sabathier, et j’ai vu monsieur Ferrand, qui a ranimé le frère Isidore… Voulez-vous que je redescende le chercher ?

Mais Pierre s’y opposa.

— Non, non, Marie va être raisonnable. Tout à l’heure, je lui lirai quelques belles pages, et elle se reposera.

Marie resta muette encore, obstinée. L’une des deux lanternes se trouvait là, contre le mur ; et Pierre voyait très nettement sa face mince, immobile. Puis, à droite, dans le lit suivant, il apercevait la tête d’Élise Rouquet, profondément endormie, sans fichu, avec sa face de monstre en l’air, dont l’horrible plaie continuait pourtant à pâlir. Et, à sa gauche, il avait madame Vêtu, épuisée, condamnée, qui ne pouvait s’assoupir, secouée d’un continuel frisson. Il lui dit quelques bonnes paroles. Elle le remercia, elle ajouta, faiblement :

— Il y a eu plusieurs guérisons aujourd’hui, j’en ai été très contente.

La Grivotte, en effet, couchée sur un matelas, au pied même du lit, ne cessait de se relever, dans une fièvre