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Page:Zola - Les Trois Villes - Lourdes, 1894.djvu/278

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très rieuses, très animées. Les voix se croisaient, de petits cris, tout un ravissement à se rencontrer de la sorte.

— Mais, ma chère, nous sommes à Cauterets. Alors, nous avons fait la partie de venir toutes les quatre, comme tout le monde. Et ton mari est ici avec toi ?

Madame Désagneaux se récria.

— Eh ! non, il est à Trouville, tu sais bien. J’irai le rejoindre jeudi.

— Oui, oui, c’est vrai ! reprit la grande brune, qui avait aussi l’air d’une aimable étourdie. J’oubliais, tu es avec le pèlerinage… Et dis donc…

Elle baissa la voix, à cause de Raymonde, demeurée là, souriante.

— Dis donc, ce bébé en retard, l’as-tu demandé à la sainte Vierge ?

Un peu rougissante, madame Désagneaux la fit taire, en lui disant à l’oreille :

— Sans doute, depuis deux ans, et bien ennuyée, je t’assure, de ne rien voir venir… Mais, cette fois, je crois que ça y est. Oh ! ne ris pas, j’ai senti positivement quelque chose, ce matin, quand j’ai prié à la Grotte.

Le rire pourtant la gagna, toutes s’exclamaient, s’amusaient comme des folles. Et, immédiatement, elle s’offrit pour les piloter, promettant de leur faire tout voir, en moins de deux heures.

— Venez donc avec nous, Raymonde. Votre mère ne s’inquiétera pas.

Il y eut des saluts échangés avec Pierre et M. de Guersaint. Gérard, lui aussi, prit congé, serra la main de la jeune fille, d’une pression tendre, les yeux dans les siens, comme pour s’engager de façon définitive. Puis, ces dames s’éloignèrent, se dirigèrent vers la Grotte ; et elles étaient six, heureuses de vivre, promenant le charme délicieux de leur jeunesse.