Page:Zola - Les Trois Villes - Lourdes, 1894.djvu/371

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Elle continuait les lotions à la fontaine miraculeuse, elle sortait justement du bureau des constatations, où le docteur Bonamy avait triomphé. Surpris, Ferrand s’avança, examina cette plaie, pâlie déjà, un peu séchée, qui était loin d’être guérie, mais où commençait tout un travail sourd de guérison. Et le cas lui parut si curieux, qu’il se promit de prendre quelques notes pour un de ses anciens maîtres de l’École, en train d’étudier l’origine nerveuse de certaines maladies de la peau, que détermine un trouble de la nutrition.

— Vous n’avez pas senti de picotements ? demanda-t-il.

— Non, non, monsieur. Je me lave et je dis mon chapelet de toute mon âme, voilà tout !

La Grivotte, vaniteuse et jalouse, qui depuis la veille triomphait au milieu des foules, appela le médecin.

— Moi, monsieur, je suis guérie, guérie, guérie complètement !

Il eut un geste amical, en refusant de l’examiner.

— Je sais, ma fille. Vous n’avez plus rien du tout.

Mais, à ce moment, sœur Hyacinthe le rappela. Elle venait de lâcher sa couture, en voyant madame Vêtu se soulever, dans une nausée atroce. Malgré sa hâte, elle n’eut pas le temps d’arriver avec la cuvette : la malade avait rendu encore un flot de déjections noires, pareilles à de la suie ; et, cette fois, du sang s’y trouvait mêlé, des filets de sang violâtre. C’était l’hémorragie, la fin prochaine que Ferrand redoutait.

— Prévenez madame la directrice, dit-il à demi-voix, en s’installant, pour rester lui-même près du lit.

Sœur Hyacinthe courut chercher madame de Jonquière. Le linge était compté, et elle la trouva en grande conversation avec sa fille Raymonde, à l’écart, pendant que madame Désagneaux se lavait les mains.

Raymonde venait de s’échapper un instant du réfectoire, où elle se trouvait de service. C’était, pour elle, la corvée