Page:Zola - Les Trois Villes - Rome, 1896.djvu/200

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— Prenez garde, mesdames, répétait le religieux en éclairant le sol avec sa bougie. Marchez doucement, il y a des bosses et des pentes.

Et il commença l’explication, d’une voix aiguë, avec une force de certitude extraordinaire. Pierre était descendu, silencieux la gorge serrée, le cœur battant d’émotion. Ah ! ces Catacombes des premiers chrétiens, ces asiles de la foi primitive, que de fois il les avait rêvées, au temps innocent du séminaire ! et, dernièrement encore, pendant qu'il écrivait son livre, que de fois il y avait songé, comme au plus antique et au plus vénérable vestige de cette communauté des petits et des simples, dont il prêchait le retour ! Mais il avait le cerveau tout plein des pages écrites par les poètes, par les grands prosateurs, qui ont décrit les Catacombes. Il les voyait à travers ce grandissement de l’imagination, il les croyait vastes, pareilles à des villes souterraines, avec des avenues larges, avec des salles amples, capables de contenir des foules. Et dans quelle pauvre et humble réalité il tombait !

— Ah ! dame, oui ! répondait le Frère aux questions de la mère et de la fille, ça n’a guère plus d’un mètre, deux personnes ne passeraient pas de front… Et comment on a creusé ça ? Oh ! c’est fort simple. Une famille, une corporation funèbre ouvrait une sépulture, n’est-ce pas ? Eh bien ! elle creusait une première galerie, à la pioche, dans ce terrain qu’on appelle du tuf granulaire : une terre rougeâtre comme vous voyez, à la fois tendre et résistante, très facile à travailler, et absolument imperméable ; enfin, une terre faite exprès, qui a merveilleusement conservé les corps.

Il s’interrompit, montra, à la faible flamme de sa bougie, les cases creusées à droite et à gauche, dans les parois.

— Regardez, ce sont les loculi… Ils ouvraient donc une galerie souterraine, dans laquelle, des deux côtés, ils pratiquaient ces cases superposées, où ils couchaient