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Page:Zola - Les Trois Villes - Rome, 1896.djvu/563

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de Frascati… Ah ! je serais si heureux, si heureux de pouvoir lui répondre par la bonne nouvelle !

De nouveau, sa joie déborda, à la pensée que le soir il verrait le pape, lui ouvrirait son âme brûlante d’amour, recevrait de lui l’encouragement suprême, raffermi dans sa mission du salut social, au nom fraternel des petits et des pauvres. Et il ne put se contenir davantage, il lâcha son secret, qui lui gonflait le cœur.

— Vous savez, c’est fait, mon audience est pour ce soir.

Benedetta ne comprit pas d’abord.

— Comment ça ?

— Oui, monsignor Nani a bien voulu m’apprendre, ce matin, à ce bal, que le Saint-Père, auquel il avait remis mon livre, désirait me voir… Et je serai reçu ce soir, à neuf heures.

Elle était devenue toute rouge, tellement elle faisait sienne la joie du jeune prêtre, qu’elle avait fini par aimer d’une ardente amitié. Et ce succès d’un ami tombant dans sa félicité à elle, prenait une importance extraordinaire, comme une certitude de complète réussite pour tout le monde. Elle eut un cri de superstitieuse exaltée et ravie.

— Ah ! mon Dieu ! ça va nous porter chance !… Ah ! que je suis heureuse, mon ami, que je suis heureuse de voir que le bonheur vous arrive en même temps qu’à moi ! C’est encore pour moi du bonheur, un bonheur que vous ne pouvez pas vous imaginer… Et c’est sûr, maintenant, que tout marchera très bien, car une maison ou il y a quelqu’un qui voit le pape est bénie, la foudre ne la frappe plus.

Elle riait plus haut, elle tapait des mains, si éclatante de gaieté, qu’il s’inquiéta.

— Chut ! chut ! on m’a demandé le secret… Je vous en supplie pas un mot à personne, ni à votre tante, ni même à Son Éminence Monsignor Nani serait très contrarié.