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MADAME NEIGEON



I


Il y a huit jours que mon père, M. de Vaugelade, m’a permis de quitter le Boquet, le vieux château mélancolique où je suis né, dans la basse Normandie. Mon père a d’étranges idées sur les temps actuels, il est d’un bon demi-siècle en retard. Enfin, j’habite donc Paris, que je connaissais à peine, pour l’avoir traversé deux fois. Heureusement, je ne suis pas trop gauche. Félix Budin, mon ancien condisciple du lycée de Caen, a prétendu, en me revoyant ici, que j’étais superbe et que les Parisiennes allaient raffoler de moi. Cela m’a fait rire. Mais quand Félix n’a plus été là, je me suis surpris devant une glace, à regarder mes cinq pieds six pouces, tout en souriant de mes dents blanches et de mes yeux noirs. Puis,