Page:Zola - Naïs Micoulin, 1884.djvu/232

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J’ai eu la sottise de répondre non, ne prévoyant pas qu’elle allait ajouter :

— Ah ! c’est fâcheux, nous partons la semaine prochaine pour les Mûreaux, cette propriété que mon mari possède à deux lieues de chez vous, je crois, et il comptait vous inviter à nous venir voir.

J’ai balbutié, j’ai dit que mon père me rappellerait peut-être plus vite que je ne pensais. Il m’avait semblé sentir son bras s’appuyer davantage sur le mien. Était-ce donc un rendez-vous qu’elle me donnait ? Dans l’idée galante que je me faisais de cette Parisienne, si libre et si raffinée, j’ai bâti tout de suite un roman, une liaison offerte à la campagne, un mois d’amour sous de grands arbres. Oui, c’était cela, elle me trouvait sans doute des grâces de gentilhomme campagnard, elle voulait m’aimer là-bas, dans mon cadre.

— J’ai à vous gronder, a-t-elle repris tout d’un coup, en prenant un air tendre et maternel.

— Comment cela ? ai-je murmuré.

— Oui, votre tante m’a parlé de vous. Il paraît que vous ne voulez rien accepter de notre main. C’est très blessant, cela. Pourquoi refusez-vous, dites ?