Page:Zola - Naïs Micoulin, 1884.djvu/238

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Jamais je ne l’avais vue si ravissante. Dans sa hâte à quitter sa chambre, elle avait noué négligemment ses cheveux, elle s’était enveloppée dans le premier peignoir venu ; et, toute fraîche, les yeux humides de sommeil, elle redevenait enfant. De petites mèches s’envolaient sur son cou. J’apercevais ses bras nus jusqu’aux coudes, lorsque ses larges manches s’entr’ouvraient.

— Vous ne savez pas où j’allais ? a-t-elle repris. Eh bien ! j’allais voir, sur ce berceau là-bas, un rideau de volubilis, qui, paraît-il, est merveilleux, quand le soleil n’a pas encore fermé les fleurs. C’est le jardinier qui m’a dit ça ; et, comme j’ai manqué mes volubilis hier, je ne veux pas les rater aujourd’hui… Vous m’accompagnez, n’est-ce pas ?

J’avais grande envie de lui offrir mon bras, mais j’ai compris que ce serait ridicule. Elle courait comme une pensionnaire échappée. Arrivée au berceau, elle a eu un cri d’admiration. Toute une draperie de volubilis pendait de haut, une pluie de clochettes emperlées de rosée et dont les teintes délicates allaient du rose vif au violet et au bleu pâles. On aurait dit une de ces fantaisies des albums japonais, d’une grâce et d’une étrangeté exquises.