Page:Zola - Naïs Micoulin, 1884.djvu/375

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Mais, ma bonne, c’est pour te rassurer… Je vois bien que tu te mines. Il faut en finir.

Félicie maigrissait en effet, sous la menace du drame dont l’attente augmentait son angoisse. Un jour enfin, le boucher s’emportait contre un garçon qui avait oublié de changer l’eau d’une tête de veau, lorsqu’elle arriva, blême, balbutiant :

— Le voilà !

— Ah ! très bien ! dit Sagnard en se calmant tout de suite. Fais-le entrer dans la salle à manger.

Et, sans se presser, se tournant vers le garçon :

— Lavez-la à grande eau, elle empoisonne.

Il passa dans la salle à manger, où il trouva Damour et Berru. C’était un hasard, s’ils venaient ensemble. Berru avait rencontré Damour rue de Clichy ; il ne le voyait plus autant, ennuyé de sa misère. Mais, quand il avait su que le camarade se rendait rue des Moines, il s’était emporté en reproches, car cette affaire était aussi la sienne. Aussi avait-il recommencé à le sermonner, criant qu’il l’empêcherait bien d’aller là-bas faire des bêtises, et il barrait le trottoir, il voulait le forcer à lui remettre son couteau. Damour haussait