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LE FORGERON


Le Forgeron était un grand, le plus grand du pays, les épaules noueuses, la face et les bras noirs des flammes de la forge et de la poussière de fer des marteaux. Il avait, dans son crâne carré, sous l’épaisse broussaille de ses cheveux, de gros yeux bleus d’enfant, clairs comme de l’acier. Sa mâchoire large roulait avec des rires, des bruits d’haleine qui ronflaient, pareils à la respiration et aux gaietés géantes de son soufflet ; et, quand il levait les bras, dans un geste de puissance satisfaite, — geste dont le travail de l’enclume lui avait donné l’habitude, — il semblait porter ses cinquante ans plus gaillardement encore qu’il ne soulevait « la Demoiselle, » une masse pesant vingt-cinq livres, une terrible fillette qu’il pouvait seul mettre en danse, de Vernon à Rouen.