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XI


J’étais allé à Versailles, et je montais la vaste cour des Maréchaux, solitude de pierres qui m’a rappelé souvent la lande déserte de la Crau, dont la mer de cailloux verdit au grand soleil.

L’hiver dernier, j’ai vu le château par des temps de neige, le toit bleuâtre, majestueux et triste sur le gris du ciel, comme le royal palais du froid. L’été, il est triste encore, plus mélancolique, plus abandonné, dans les tiédeurs de l’air, au milieu des pousses puissantes des arbres du parc. À chaque belle saison, les vieux troncs se refont une jeunesse de feuilles. Le château agonise ; la sève de la vie ne monte plus dans ses pierres qui s’émiettent ; la ruine vient, implacable, rongeant les angles, descellant les dalles, faisant à chaque heure son travail de mort.

Les logis, bouges ou palais, ont leurs maladies dont ils languissent et dont ils meurent. Ce sont de grands corps vivants, des personnes qui ont