Page:Zola - Nouveaux contes à Ninon, 1893.djvu/37

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— La lune, certainement, murmura le comte, pourtant en tournant le dos…

— Non, non, mille fois non. Nous attendrons que la lune ne soit plus là… Vous voyez, elle marche. Quand elle aura atteint cet arbre, nous serons dans l’ombre…

— C’est qu’il y en a pour une bonne heure, avant qu’elle soit derrière cet arbre !

— Oh ! trois quarts d’heure au plus… Ça ne fait rien. Nous attendrons… Quand la lune sera derrière l’arbre, vous pourrez vous en aller.

Le comte voulut protester ; mais, comme il faisait des gestes en parlant, et qu’il se découvrait jusqu’à la ceinture, elle poussa de petits cris de détresse si aigus, qu’il dut, par politesse, rentrer dans le bassin jusqu’au menton. Il eut la délicatesse de ne plus remuer. Alors, ils restèrent tous les deux là, en tête-à-tête, on peut le dire. Les deux têtes, cette adorable tête blonde de la baronne, avec les grands yeux que tu sais, et cette tête fine du comte, aux moustaches un peu ironiques, demeurèrent bien sagement immobiles, sur l’eau dormante, à une toise au plus l’une de l’autre. L’Amour de plâtre, sous la draperie de lierre, riait plus fort.