Page:Zola - Thérèse Raquin, Lacroix, 1868.djvu/272

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C’étaient des mensonges puérils, des affirmations ridicules, la dispute toute de mots de deux misérables qui mentaient pour mentir, sans pouvoir se cacher qu’ils mentaient. Successivement, ils prenaient le rôle d’accusateur, et, bien que jamais le procès qu’ils se faisaient n’eût amené un résultat, ils le recommençaient chaque soir avec un acharnement cruel. Ils savaient qu’ils ne se prouveraient rien, qu’ils ne parviendraient pas à effacer le passé, et ils tentaient toujours cette besogne, ils revenaient toujours à la charge, aiguillonnés par la douleur et l’effroi, vaincus à l’avance par l’accablante réalité. Le bénéfice le plus net qu’ils tiraient de leurs disputes, était de produire une tempête de mots et de cris dont le tapage les étourdissait un moment.

Et tant que duraient leurs emportements, tant qu’ils s’accusaient, la paralytique ne les quittait pas du regard. Une joie ardente luisait dans ses yeux, lorsque Laurent levait sa large main sur la tête de Thérèse.