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Page:Zola - Thérèse Raquin, Lacroix, 1868.djvu/36

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se remettre au commerce, trouver une occupation lucrative pour Thérèse. Le lendemain, elle s’était habituée à l’idée de départ, elle avait bâti le plan d’une vie nouvelle.

Au déjeuner, elle était toute gaie.

— Voici ce que nous allons faire, dit-elle à ses enfants. J’irai à Paris demain ; je chercherai un petit fonds de mercerie, et nous nous remettrons, Thérèse et moi, à vendre du fil et des aiguilles. Cela nous occupera. Toi, Camille, tu feras ce que tu voudras ; tu te promèneras au soleil ou tu trouveras un emploi.

— Je trouverai un emploi, répondit le jeune homme.

La vérité était qu’une ambition bête avait seule poussé Camille au départ. Il voulait être employé dans une grande administration ; il rougissait de plaisir, lorsqu’il se voyait en rêve au milieu d’un vaste bureau, avec des manches de lustrine, la plume sur l’oreille.

Thérèse ne fut pas consultée ; elle avait toujours montré une telle obéissance passive que sa tante et son mari ne prenaient plus la peine de lui demander son opinion. Elle allait où ils allaient, elle faisait ce qu’ils faisaient, sans une plainte, sans un reproche, sans même paraître savoir qu’elle changeait de place.

Madame Raquin vint à Paris et alla droit au passage du Pont-Neuf. Une vieille demoiselle de Vernon l’avait adressée à une de ses parentes qui tenait dans ce passage un fonds de mercerie dont elle désirait se débarrasser. L’ancienne mercière trouva la boutique un peu