Page:Zola - Travail.djvu/282

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Clouque fut alors bruyamment discutée, pour le forcer à s’engager plus à fond. Le ruisseau infect devint une des parures de Beauclair, on ne volait point ainsi l’eau d’une ville, surtout pour la donner à des paysans après leur avoir détraqué la cervelle, au point de faire de leur village un foyer de furieuse anarchie, dont la contagion menaçait le pays entier. Toute la terreur bourgeoise apparut, car l’antique et sainte propriété était bien malade, si les fils des durs paysans d’autrefois en arrivaient à mettre en commun leurs lopins de terre. Il était grand temps que la justice s’en mêlât, en faisant cesser un pareil scandale.

«  Nous sommes bien tranquilles, finit par dire Boisgelin d’une voix flatteuse, la cause de la société va se trouver en de bonnes mains. Rien n’est au-dessus d’un jugement juste, rendu en toute liberté par une conscience honnête.

— Sans aucun doute  », répéta Gaume simplement.

Et il fallut, cette fois, se contenter de cette parole vague, ou l’on voulut voir la condamnation certaine de Luc. C’était fini, il n’y avait plus, après une salade russe, qu’une glace à la fraise et le dessert. Mais les estomacs s’étaient épanouis, on riait beaucoup, on tenait la victoire. Et, lorsqu’on fut passé au salon pour prendre le café, et que les Mazelle arrivèrent, on les accueillit comme toujours avec une affection un peu moqueuse, tant ces braves rentiers, les délices de la paresse, attendrissaient les cœurs. La maladie de Mme  Mazelle n’allait pas mieux, mais elle en était ravie, elle avait obtenu du docteur Novarre de nouveaux cachets avec lesquels elle pouvait manger impunément de tout. Il n’y avait plus que les abominables histoires de la Crêcherie, les menaces de la suppression de la rente, de l’abolition de l’héritage, qui lui tournassent les sangs. À quoi bon parler de choses désagréables  ? Mazelle, qui veillait béatement