Page:Zola - Travail.djvu/654

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cessaient d’être l’exception rare, les producteurs de génie se levaient en foules. La chimie déjà révolutionnait l’alimentation, la terre aurait pu ne plus produire de blé, ni d’oliviers, ni de vignes, il serait sorti quand même des laboratoires assez de pain, d’huile et de vin, pour en fournir la ville entière. En physique, en matière d’électricité surtout, les inventions continuaient à reculer les bornes du possible, donnaient aux hommes la toute-puissance des dieux, sachant tout, voyant tout, pouvant tout. Puis, c’était l’envol des artistes, la beauté élargie, accrue, devenue une floraison immense, universelle, où tous pouvaient se fleurir et se parfumer. Il n’était pas de produits modestes, d’objets d’usage courant, d’ustensiles de ménage, où l’art ne s’épanouît en charmantes imaginations, dans la forme, la couleur, l’expression même. Lange, avec ses briques émaillées, ses faïences et ses grès polychromes, avait le premier embelli la vie quotidienne des foules, et maintenant des légions d’artistes se levaient, il naissait un artiste en chaque ouvrier industriel, le travail de tous les métiers n’allait plus sans la beauté innée, la beauté grande et simple de l’œuvre vécue, voulue, adaptée au service qu’elle devait rendre. Puis, c’était une extraordinaire végétation de tous les arts, depuis que l’âme de la foule battait dans toutes les âmes, et que toute la vie était vécue, avec toutes les passions libérées, tout l’amour donné et reçu. S’inspirant de cette dilection universelle, la musique était la voix même du peuple heureux, des musiciens trouvaient pour lui, venant de lui, des chants sublimes, dont la continuelle harmonie baignait les théâtres, les ateliers, les maisons, les rues. Des architectes bâtissaient pour le peuple des palais immenses et superbes, faits à son image, d’une ampleur, d’une majesté une et variée comme la multitude, avec les adorables fantaisies des milliers d’individualités qui s’y résumaient. Des sculpteurs peuplaient