La nuit était complètement venue, Geneviève alluma la lampe. Et, dans la clarté pâle, lorsqu’elle mit silencieusement la table, il ne voulut même pas la confesser, il écarta cet autre chagrin de ne plus, peut-être la savoir d’accord avec lui, sur bien des choses.
Mais, les jours suivants, les dernières paroles de Mme Duparque le hantèrent. En effet, s’il tentait de faire usage du fait nouveau, venu si heureusement à sa connaissance, quelle créance trouverait-il près du public ? Sans doute il aurait le témoignage de Sébastien, l’enfant répéterait qu’il avait vu le modèle d’écriture apporté de chez les frères par son cousin Victor. Seulement, ce serait là le témoignage d’un petit garçon de dix ans à peine, dont la mère s’efforcerait d’affaiblir la portée. C’était le document lui-même qu’il aurait fallu produire, et venir dire qu’on l’avait brûlé, n’était-ce pas enterrer l’affaire une seconde fois ? Plus il réfléchissait, plus il se convainquait de la nécessité d’attendre encore, le fait nouveau n’étant pas utilisable, dans les conditions où il l’avait découvert. Combien pourtant il était précieux pour lui, fertile en preuves décisives. Il achevait de rendre sa foi inébranlable, il confirmait toutes ses déductions, matérialisait la certitude à laquelle il était arrivé par le raisonnement. Un frère était le coupable, il ne restait qu’un pas à franchir pour savoir lequel, une enquête loyale l’aurait immédiatement découvert. Et il dut se résigner à patienter de nouveau, à compter sur la force de la vérité, qui était en marche, qui ne s’arrêterait plus, avant que la pleine lumière éclatât. Mais, dès ce moment, son angoisse grandit, le débat devint de jour en jour plus tragique dans sa conscience. Savoir qu’un innocent souffre au bagne une abominable torture, que le vrai coupable est là, impudent, triomphant, continuant sa besogne d’empoisonneur d’enfants, et ne pouvoir crier cela tout haut, et