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Page:Zola - Vérité.djvu/383

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n’est-ce pas ? c’est l’ami de Simon, dont il est sur le point de faire éclater l’innocence, qu’il s’agit d’abattre… Et, tu as raison, je ne veux pas d’un scandale, qui ferait plaisir à trop de monde.

— Alors, laisse-moi partir, dit-elle encore avec obstination.

— Oui, tout à l’heure… Auparavant, sache bien que je t’aime toujours, davantage même, comme une pauvre enfant souffrante, prise d’une de ces fièvres contagieuses, dont la guérison est si longue. Mais je ne désespère pas, car tu es au fond une bonne et saine créature, une raisonnable et une amoureuse, qui forcément se réveillera un jour de son cauchemar… Et puis, nous avons vécu près de quatorze ans ensemble, c’est moi qui t’ai faite femme, épouse et mère, et même si j’ai eu le tort de ne pas te refaire toute, j’ai mis pourtant trop de choses nouvelles en toi, pour qu’elles ne continuent pas d’agir… Tu me reviendras, Geneviève.

Elle eut un rire de bravade.

— Je ne crois pas.

— Tu me reviendras, reprit-il d’une voix convaincue ; Quand tu sauras la vérité, l’amour que tu as eu pour moi fera le reste ; et tu es une tendre, tu n’es pas capable d’une longue injustice… Jamais je ne t’ai fait violence, j’ai toujours respecté ta volonté, va donc à la folie, épuise-la jusqu’au bout puisqu’il n’y a pas d’autre façon de t’en guérir.

Il s’était écarté de la porte, il lui livrait passage. Un instant, elle parut hésiter, sous toute l’ombre frissonnante qui envahissait cette maison chère, le foyer domestique en larmes. On ne voyait plus son visage, que les paroles de son mari avaient bouleversé. Et elle se décida, brusquement, ce fut d’une voix étranglée qu’elle cria :

— Adieu !