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Page:Zola - Vérité.djvu/46

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La nuit, Marc ne put dormir. Il était hanté par les événements de la veille, ce crime monstrueux, mystérieux, dont la redoutable énigme se posait à son intelligence. Et, pendant que Geneviève, sa femme adorée, reposait paisiblement à son côté, et qu’il entendait venir du petit lit voisin le souffle régulier de sa chère Louise, il revivait chaque détail, il classait les renseignements, s’efforçait de pénétrer les ténèbres et de faire éclater la vérité.

Marc était un esprit logique et de lumière. La raison, très nette et très solide en lui, avait le besoin de tout baser sur la certitude. Et de là venait son absolue passion de la vérité. Il n’y avait à ses yeux de repos possible, de bonheur vrai que dans la certitude, lorsqu’elle se trouvait complète, définitive et décisive en son être. Il n’était pas un grand savant, mais il tenait à bien savoir ce qu’il savait, à ne plus douter de la possession de la vérité, une vérité expérimentale, acquise à jamais. Sa souffrance cessait avec son doute, il redevenait très gai, très bien portant, et sa passion de la vérité n’avait ensuite d’égale que sa passion de l’enseigner aux autres, de la faire entrer dans les crânes et dans les cœurs de tous. Alors, se manifestaient ses dons merveilleux, il apportait la méthode qui simplifie, classe, inonde tout de sa clarté. Sa conviction tranquille s’imposait, les notions obscures s’éclairaient, paraissaient aisées et simples. Il donnait un intérêt, une âme, une vie aux éléments les