titres assuraient une messe annuelle. Enfin, le prospectus expliquait qu’on avait donné à ces titres le nom d’obligations de saint Antoine, puisque le saint était le caissier chargé de les rembourser au centuple dans l’autre monde. Et il terminait par ces phrases : « De telles garanties surnaturelles font de ces obligations de vraies obligations hypothécaires, d’une sûreté absolue. Aucune catastrophe financière ne peut les menacer. La destruction du monde elle-même, à la fin des temps, les laisserait indemnes, ou plutôt mettrait immédiatement les souscripteurs en jouissance des intérêts capitalisés. »
Ce fut un succès énorme, retentissant. Des milliers d’obligations se trouvèrent placées en quelques semaines. Les dévotes trop pauvres se cotisaient, mettaient chacune vingt sous, puis se partageaient les coupons. Toutes les âmes crédules et souffrantes risquaient leur argent, à cette loterie nouvelle, dont le gros lot représentait la chimère tant caressée, une éternité de survie heureuse. Cependant, le bruit courait que Mgr Bergerot, très ému, allait interdire cette impudente spéculation, qui scandalisait certains catholiques raisonnables. Puis, il ne dut point oser, dans la fâcheuse situation où l’avait mis la défaite des simonistes qu’on l’accusait d’avoir toujours appuyés sourdement. Jamais il ne s’était senti le courage de tenir tête à la congrégation toute-puissante, peu sûr de son clergé, navré d’avoir à livrer l’Église au flot de la superstition montante. Avec l’âge, il était devenu plus faible encore, il ne lui restait que la force de s’agenouiller en demandant pardon à son Dieu de laisser ainsi les marchands envahir le temple, pour sauver le temple lui-même, que les fidèles auraient déserté, s’ils n’y étaient venus trafiquer de leur âme. Mais, à Maillebois, le curé de Saint-Martin, l’abbé Quandieu, n’en put supporter davantage. Cette fois, la condamnation de Simon l’avait frappé au cœur, dans son désespoir de voir l’Église consommer