Page:Zola - Vérité.djvu/61

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affreuse aventure, mon ami, nous ne savons plus si nous vivons.

L’autopsie du petit Zéphirin allait avoir lieu le matin même, on attendait le médecin envoyé par le Parquet. Les obsèques ne pourraient sans doute se faire que le lendemain.

— Alors, tu comprends, je suis comme dans un cauchemar, je me demande si tant de malheur est possible. Depuis hier matin, je ne puis pas penser à autre chose, je recommence toujours la même histoire, mon retour à pied, ma rentrée tardive, si tranquille, dans la maison endormie, et l’effroyable réveil, le lendemain matin !

L’occasion se présentant, Marc crut pouvoir risquer quelques questions.

— Tu n’as rencontré personne en chemin ? Personne ne t’a vu rentrer ici, à l’heure que tu as dite ?

— Ma foi, non ! Je n’ai rencontré personne, et je crois bien que personne ne m’a vu rentrer. À cette heure de nuit, Maillebois est absolument désert.

Il y eut un silence.

— Mais, si tu n’as pas pris le chemin de fer, pour revenir, tu ne t’es pas servi de ton billet de retour. L’as-tu encore, ce billet ?

— Mon billet de retour, non ! J’étais si furieux de voir filer le train de dix heures et demie devant moi, que je l’ai jeté dans la cour de la gare, en me décidant à faire la route à pied.

Il y eut un nouveau silence, pendant lequel Simon regarda fixement son ami.

— Pourquoi me demandes-tu ces choses ?

Marc lui reprit affectueusement les deux mains, les garda un instant entre les siennes, se décidant à le prévenir du danger, à tout lui dire.

— Oui, je regrette que personne ne t’ait vu, et je regrette plus encore que tu n’aies pas conservé ton billet de retour. Il y a