Page:Zola - Vérité.djvu/717

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée



Des années, des années s’écoulèrent encore, et Marc à quatre-vingts ans passés, par un bienfait de la vie qui semblait vouloir le récompenser de l’avoir tant aimée, tant servie, en les gardant debout, lui et son adorée Geneviève, comme des spectateurs triomphants, goûta la joie suprême de voir son rêve se réaliser toujours davantage.

Les générations, les enfants des enfants continuaient à monter, en un flot de plus en plus instruit, libéré, épuré. Autrefois, il y avait eu deux France, recevant chacune une instruction différente, comme cultivée à part, et dès lors s’ignorant, s’exécrant et se combattant. Pour les masses profondes du peuple, pour l’immense majorité des campagnes l’enseignement primaire existait seul, à peine la lecture, l’écriture, un peu de calcul, le rudiment, ce qui suffisait à dégager l’homme de la brute. Pour la bourgeoisie, l’infime minorité élue, maîtresse par son rapt de l’argent et du pouvoir, s’ouvraient l’enseignement secondaire, l’enseignement supérieur, toutes les facilités de savoir et de régner. L’affreuse iniquité sociale se trouvait consacrée ainsi, une dalle pesante scellait les pauvres et les humbles dans leur ignorance, défense à eux d’apprendre, de connaître, de devenir les savants, les puissants, les maîtres. Parfois, il s’en échappait un qui s’élevait au rang le plus haut. Mais c’était l’exception