Page:Zola - Vérité.djvu/76

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son cœur doux et droit. Lui, fou de jalousie la querellant sans cesse sur ce qu’il appelait ses infidélités de pensées, voyait uniquement dans la confession et la communion une police, un frein moral, excellent pour arrêter les femmes sur la pente de la trahison. Et elle avait dû céder, elle avait pris le directeur choisi par lui, le père Théodose, dans lequel elle sentait sourdement un violateur. Aussi, blessée, rougissante, haussait-elle les épaules, en obéissant comme toujours, pour la paix de la maison.

— Quant à mes enfants, monsieur, continua Savin, mes ressources ne me permettent pas d’envoyer au collège Achille et Philippe, les deux jumeaux, et je les ai mis naturellement à l’école laïque, comme fonctionnaire et comme républicain. De même, ma fille Hortense va chez Mlle Rouzaire ; mais je suis au fond très content que cette demoiselle ait des sentiments religieux et qu’elle conduise ses élèves à l’église, car c’est en somme son devoir, je me plaindrais, si elle ne le faisait pas… Les garçons, ça se tire toujours d’affaire. Et, pourtant, si je ne devais pas rendre compte de ma conduite à mes chefs, croyez-vous que je n’aurais pas agi plus sagement en mettant les miens dans une école congréganiste ?… Ils seraient, plus tard, poussés, casés, soutenus, tandis qu’ils végéteront ainsi que j’ai végété moi-même.

Son amertume débordait, il baissa la voix, pris d’une sourde peur.

— Voyez-vous, les curés sont les plus forts, on devrait quand même être avec eux.

Marc fut pris de pitié, tant le pauvre être chétif, tremblant, enragé de médiocrité et de sottise, lui parut à plaindre. Il s’était levé, s’attendant bien à la conclusion de tous ces discours.

— Alors, monsieur, ce renseignement que je désirais demander à vos enfants ?