Page:Zweig - Émile Verhaeren, sa vie, son œuvre.djvu/122

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la rondeur des formes, que nous imaginons un jeu de lignes nobles et élancées qui exprime avant tout quelque chose d’intellectuel. Pour nous la beauté s’éloigne de plus en plus du plan extérieur, du corps lui-même, pour aller vers l’expression intérieure, vers le psychique. À mesure que la force d’expansion trouve moins à s’extérioriser, et que l’harmonie se fait moins apparente, la beauté s’intellectualise. Pour nous, elle est moins la beauté dans son apparence que dans sa fin. À notre admiration pour le télégraphe ou pour le téléphone, les formes extérieures ne sauraient suffire, réseau des fils, commutateurs et récepteurs ; la beauté en est toute spirituelle ; c’est l’idée que nous nous formons de la course de l’étincelle à travers l’espace, franchissant des parties du monde. Ce n’est pas par son armature de fer, par le bruit qu’elle fait, ou la suie qui la recouvre, qu’une machine est admirable, mais par l’idée qui est enfermée dans son organisme qui est le principe de son action merveilleuse. La conception moderne de la beauté ne doit pas seulement s’enchaîner à celle de la beauté dans l’avenir. L’esthétique future sera une sorte d’idéologie, ou, comme dit Renan, une identité