Page:Zweig - Émile Verhaeren, sa vie, son œuvre.djvu/125

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chines n’ont pas encore triomphé : à leurs côtés subsistent des travailleurs manuels. Les petites villes sont encore innombrables où l’idylle peut se réfugier et retrouver des coins de la beauté ancienne. Ce n’est que lorsque le poète n’aura plus aucune possibilité de fuir vers un idéal hérité, qu’il sera obligé de se transformer. Car les choses nouvelles n’ont pas encore produit leur beauté organique. Chaque nouveauté se présente avec un mélange d’étrangeté, de brutalité, de laideur. Ce n’est que peu à peu que sa forme particulière se constitue. Les premiers bateaux à vapeur, les premières locomotives, les premières automobiles furent choses laides. Mais les modernes torpilleurs aux formes fines et élancées, les automobiles aux vives couleurs, enfermant leur mécanisme et glissant sans bruit, les grandes machines de la ligne du Pacifique avec leur large poitrail, s’imposent à notre admiration par leur seul aspect extérieur. Les grands magasins — comme ceux que Messel a bâtis à Berlin — affirment une beauté de fer et de verre, qui sans doute n’est pas moindre que celle des cathédrales et des palais d’autrefois. Des choses gigantesques, comme la Tour Eiffel, le Forth