Page:Zweig - Émile Verhaeren, sa vie, son œuvre.djvu/163

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timent de la foule, puisant au sein des masses populaires une énergie nouvelle, viendra réclamer une éthique, une esthétique en accord avec cette nouveauté. Ici le chant magnifique de l’Utopie s’élève de l’œuvre de Verhaeren. Dans les Aubes, épilogue des Villes tentaculaires, s’élance au-dessus des spectacles de la réalité cet éclatant arc-en-ciel, qui monte jusqu’au nouvel idéal. C’est justement parce que cet état n’est pas encore atteint que le vieux continent brûle d’une terrible fièvre et qu’il s’agite en lentes convulsions. Aussi traversons-nous ces troublantes crises, morales et psychiques, qui parfois, dans les pays les plus éloignés, se manifestent spontanément avec les mêmes phénomènes. Là est la cause de toutes les inquiétudes et de toutes les luttes qui bouleversent les esprits de notre temps.

Cet appel à l’Européen, c’est Verhaeren qui le premier l’a clamé dans ses poèmes, presque dans le même temps que Walt Whitman s’adressait à l’Américain, et que Frédéric Nietzsche découvrait le surhomme. Dresser le Paneuropéen en face du Panaméricain et résoudre cette antithèse serait plein de séduction et d’intérêt. Mais il suffit de dire que Verhaeren a été le premier à