Page:Zweig - Émile Verhaeren, sa vie, son œuvre.djvu/167

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rait, anéantirait au plus intime d’elles cet élément de nouveauté. Certes, la ville et la foule ne connaissent pas tous les jours ces grandes explosions de la passion, qui les font ressembler à des volcans, au moment desquels les rues, pareilles à de grandes artères, semblent charrier des fleuves de sang, où tous leurs muscles paraissent contractés, où les cris et les enthousiasmes jaillissent ainsi qu’une flamme. Mais il est en elles comme un ferment qui paraît n’attendre pour lever que cet instant, de même que tout homme moderne éprouve au fond de son âme comme une attente, une inquiétude devant la nouveauté, devant l’avenir que lui réserve demain la vie. Les villes et la foule de leurs habitants sont dans une incessante vibration. Si l’individu, pris en particulier, ne connaît pas d’excitation, si ses nerfs ne vibrent pas toujours d’une agitation personnelle, ils vibrent cependant comme de la résonnance de la note sourde du monde. Les oscillations de la grande ville se prolongent jusque dans notre sommeil. Le rythme nouveau, celui de notre vie, n’est qu’une perpétuelle agitation.

Aussi bien le poète qui veut vraiment s’accorder au sentiment contemporain doit parti-