Page:Zweig - Émile Verhaeren, sa vie, son œuvre.djvu/230

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combat de sa propre conscience et de celle de ses frères qui, plus faciles, lui ont depuis longtemps pardonné. Pour recouvrir la liberté de son âme, il fait sa confession devant tous les autres moines. Et il n’est pas encore libéré : contre la volonté du monastère, il renouvelle cette confession devant le peuple et se remet lui-même aux juges séculiers. L’idée catholique de la confession s’allie ici d’admirable façon à la conception de Dostoïevski du rachat de la faute par son aveu même, de la délivrance par la soumission au châtiment volontairement imposé. Au cours de ces trois actes, après un crescendo régulier, l’aveu tragique jaillit comme une flamme. Inspiré d’abord par la crainte, puis par le sentiment de la justice, cet aveu devient enfin pour le criminel une volupté véritable. Et ce sont ces sublimes et lyriques extases qui, comme de grandes ailes, soutiennent l’envol de cette tragédie.

Dans la seconde tragédie, les Aubes, toute la scène appartient au présent. Elle a pour décor les « villes tentaculaires », dont les bras de pieuvre épuisent la pauvreté des campagnes agonisantes. Les mendiants, les miséreux, les affamés, les exilés marchent vers Oppidomagne, la moderne ville industrielle, où ils campent.