Page:Zweig - Émile Verhaeren, sa vie, son œuvre.djvu/287

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cesse, dans une harmonie, éclatent des notes opposées qui s’accordent. Le dernier conflit entre l’homme et la nature s’apaise dans le sentiment extatique de l’humanité divine.

Ainsi se referme, d’une façon imprévue, le cercle de l’évolution de Verhaeren. L’œuvre de l’homme mûr évoque ses jours d’adolescence sur les bancs du collège de Gand, où s’était assis également Maeterlinck, l’autre grand Flamand. Tous deux, après s’être égarés, se sont retrouvés au point culminant de leur existence, dans une même conception du monde. Car la pensée dernière de Maeterlinck, qui se reflète dans la Sagesse et la Destinée, est que le sort de l’homme est en lui-même, que son progrès dernier et son devoir suprême est de subjuguer le destin, la réalité, et Dieu. Cette pensée profonde, qui a fleuri, à deux reprises, sur la terre flamande, est le résultat de deux inspirations différentes. Maeterlinck l’a recueillie dans la mystique du silence, Verhaeren l’a fait jaillir du tumulte de la vie. Ce n’est pas dans la pénombre des rêves qu’il a trouvé son Dieu : c’est dans la lumière des rues, partout où l’homme travaille, partout où, parmi les heures pénibles, fleurit la fleur tremblante de la joie.